La tarification aérienne ressemble à un mille-feuille. C'est à ce point vrai que votre voisin de rangée peut très bien avoir payé son billet dix fois plus cher que vous. Ou, plus rageant, cinq fois moins cher.
Finis en effet les tarifs publiés noir sur blanc dans l'horaire de poche semestriel des compagnies. Désormais, la tarification change selon la date de la réservation, le choix du vol, son taux prévisible de remplissage, etc. On appelle cela le yield management, une forme d'optimisation de l'occupation des sièges, donc de la recette. A tout moment, le prix peut changer en fonction de l'offre et de la demande. Cette méthode scientifique de calcul des prix, apparue au début des années 80, garantit le chiffre d'affaires de chaque vol, mais déconcerte considérablement le passager. Résultat, bien malin qui peut deviner le prix qu'il va finalement payer, d'autant qu'une cascade de suppléments obligatoires s'ajoutent au tarif initial: taxe aéroportuaire et de sécurité, surcoût pétrolier... Illustration.
Des services réservations sans numéros verts. Dès que vous appelez la compagnie, vous commencez à payer: le numéro d'Air France (0 820 820 820) coûte 0,12 € TTC/mn, celui de British Airways (0 825 825 400) et celui de Lufthansa (0 826.10.33.34) 0,15 € TTC/mn. La SNCF n'est pas en reste avec le 3635 à 0,34 €/mn. Une mauvaise habitude prise il y a trente ans avec le 3615 du Minitel. Inutile de préciser que ces communications ne sont pas prises en compte dans les forfaits des abonnements téléphoniques fixe ou mobile...
Produits d'appel sur Internet, le reste par téléphone. La machine à sous fonctionne très bien pour certaines compagnies low-costs qui n'affichent sur Internet que leurs meilleurs tarifs. En téléphonant au centre d'appel de Ryanair, la communication est à 0,34 € /mn. Pour easyJet, compter 1,349 € par appel, puis 0,337 € la minute.
Attention au change. Des frais de change apparaissent quand la monnaie n'est pas l'euro. Les tarifs en euros sur les sites Internet français, allemand, italien ou espagnol des transporteurs hors Union européenne sont convertis en monnaie locale au moment de payer avec une carte de crédit. Mais votre compte bancaire, lui, est débité en euros après un aller-retour générateur de frais bancaires.
Commission illégale sur la carte bancaire. Autre piège, la commission sur la carte bancaire. La pratique est illégale en France mais elle reste allégrement adoptée par les compagnies low-costs. Coût: de 0,60 à 2,50 €, pudiquement baptisés «frais d'administration».
Ticket papier payant. Les compagnies s'apprêtent à demander une contribution à ceux qui souhaitent avoir un ticket cartonné plutôt qu'un billet électronique. Ce dernier, en fait un simple numéro, présente d'indéniables avantages pour le passager. La perte d'un billet classique coûte au moins 50 € et demande six mois de formalités, alors que le titre de transport virtuel est, par essence, impossible à égarer. Depuis la semaine dernière, le billet papier coûte 15 € chez SAS. Air France s'apprête à annoncer une sanction comparable.
Le carburant et la sécurité sont devenus des taxes! La surcharge carburant est censée répercuter les hausses de prix du baril de pétrole. Imagine-t-on le boulanger laissant le prix de la baguette à son niveau habituel mais appliquant un supplément coût de la farine? Codifiée YQ sur le billet, cette taxe incorpore aussi le coût des mesures de sûreté prises dans les aéroports depuis 2009. Ces charges font partie intégrante de l'exploitation d'un avion. En les sortant du prix du billet, la concurrence est faussée: trop souvent encore, les promotions affichent en effet des prix hors taxes (ce qui, théoriquement, est interdit en France). La comparaison entre compagnies qui n'appliquent pas les mêmes surcharges devient alors impossible. Les low-costs intègrent les surcharges carburant au prix du billet, souvent au travers d'un artifice qui consiste à réduire le nombre de places à bas tarif. A Amsterdam, note l'association des voyagistes néerlandais, le prix moyen d'un billet (hors taxes) a diminué au cours des quinze dernières années, mais les taxes et suppléments demandés par les compagnies sont en progression constante depuis 2009. Ces suppléments étaient en moyenne de 31 € en 2009. Ils sont passés à 80 € en 2011.
Service non compris. Le nom de la dernière taxe, introduite récemment, ne manque pas de piquant: «frais de service». Soit 10 € pour un vol intérieur, par exemple. Vous avez utilisé votre ordinateur pour réserver? Celui-ci est connecté à votre ligne téléphonique et utilise votre abonnement à Internet. Puis votre imprimante a émis le billet, éventuellement la carte d'embarquement sur votre papier... En fait, vous avez réalisé le travail de l'agent de voyages d'autrefois qui touchait une commission. Ce qui ne vous empêche pas de verser des frais de service.
Bagages facturés. Le transport des bagages n'est plus compris chez Ryanair. A partir du 16 mars, 15€ par bagage et par voyage sont demandés si l'enregistrement a été préalablement réservé sur le site Internet de la compagnie. Sinon, il faut payer 28€ par bagage présenté au dernier moment.
Assurance surréservation. Avoir un billet en main ne promet pas un embarquement immédiat. C'est l'effet du surbooking. American Airlines expérimente une nouvelle taxe de 25 dollars, qui prendrait la forme d'une assurance contre la surréservation.
Boissons payantes. A bord, restez prêt à sortir quelques pièces ou billets pour les écouteurs ou les boissons alcoolisées. Chez les compagnies low-costs, la règle est claire: aucune prestation n'est gratuite. Le consommateur est plus décontenancé quand les compagnies font avion commun (billets en code-share). Ainsi, les boissons sont-elles gratuites entre Paris et Atlanta sur un appareil d'Air France, mais payantes lors du même voyage assuré par Delta.