Sur la carte, elle a la forme d’une mangue, flottant entre le golfe du Bengale et l’océan Indien. Du sud de l’Inde, auquel elle était rattachée, elle a gardé les luxuriances, les touffeurs tropicales; avec les Maldives, ses petites sœurs lointaines, elle partage les plages de sable blanc sous les cocotiers. Indolente et violente, elle porte la marque de tous ceux qui l’ont traversée, et à chaque fois rebaptisée. L’île du Lanka fut la Taprobane des Grecs, puis en sanscrit la Sinhaladipa («l’île des lions»), la Singhalam des Tamouls, la Serendib des Arabes, la Ceilão des Portugais transformée en Zeilan par les Hollandais, Ceylon par les Anglais, Ceylan par les Français… avant de reprendre en 1972 son nom ancien de Lanka, précédé de Sri («saint») la désignant comme terre sacrée.
Ile sacrée… île mystérieuse, et dangereuse. Hantée de sortilèges, de présences invisibles et de menaces plus triviales: myriades d’insectes, serpents venimeux (on estime que deux personnes par jour décèdent de leurs morsures), folie des hommes: la guerre civile entre Tamouls et Cinghalais a laissé le pays exsangue. La priorité longtemps accordée aux dépenses militaires fait que les routes ont été négligées, d’où les difficultés du moindre déplacement. Mais l’effort et la fatigue sont amplement récompensés par la découverte de fabuleux royaumes au cœur de la jungle dans des sites comme Anuradhapura, Mihintale, Polonnaruwa, Dambulla… A Sigiriya, l’escalade des mille marches de la «colline du Lion» commence entre les pattes géantes de briques et de pierres, restes de la façade en forme de lion du palais. Au passage, on admire la délicatesse de jeunes femmes peintes il y a quinze siècles sur la paroi rocheuse. Au pied de ce qui fut la forteresse du roi Karyapa s’étendent des jardins royaux du ve siècle, les plus anciens d’Asie.
A Kandy, on se joint aux pèlerins qui défilent au temple de la Dent de Bouddha. Dans cette ancienne capitale se trouve le jardin botanique de Peradeniya, dont les origines remontent aux jardins royaux du xive siècle. Il témoigne de la richesse et de la variété d’une flore unique au monde, d’une nature incroyablement généreuse. C’est ici que furent acclimatés, en 1839, les premiers plants de thé apportés de Calcutta. Grâce à James Taylor, qui en entreprit la culture, mais surtout à Thomas Lipton, le thé de Ceylan a acquis une notoriété internationale. L’île est aujourd’hui le troisième producteur et le premier exportateur mondial. De Kandy à Nuwara Eliya, la route du thé serpente entre vallons et collines brumeuses, dans une somptueuse palette de verts. Les cueilleuses lourdement chargées saluent les étrangers au passage. La visite des plantations, où l’on est initié au rituel de la fermentation et du séchage des feuilles, est fascinante. Sur le chemin, on s’enivre des parfums des jardins d’épices: cardamome, muscade et gingembre, vanille et cannelle… des arômes que l’on retrouve dans les centres de médecine ayurvédique, inspirée des préceptes indiens de l’ayurveda («la science de la longévité»). Tisanes, bains de plantes, massages aux huiles essentielles laissent le corps régénéré et l’âme apaisée.
Sri Lanka
Pratique
Aller-retour Paris-Colombo via Doha, Qatar Airways, à partir de 543e, 01-58-22-20-00, www.qatarairways.com Circuits «Connaissance de Ceylan» et voyages à la carte à partir de 1500e, Compagnie des Indes et de l’Extrême-Orient, 01-53-63-33-40.
Traitement antipaludéen conseillé. Prévoir répulsifs et vêtements couvrants.
A Dambulla: Culture Club et Eco Lodge. Au bord du lac de Kandalama, des bungalows et des maisons en adobe, avec soins ayurvédiques, à partir de 50 e. A Kandy, le Kandyan, dans un paysage impressionnant, à partir de 50 e. A Bentota, le Club Villa, séjour de charme dans une villa coloniale de l’architecte Geoffrey Bawa, accueil parfait, à partir de 80 $ américains, (94) 77-36-29-84. Une adresse exceptionnelle: le manoir Pahala Walauwa à Kothmale, (94) 74-61-50-61. Au cœur de la jungle, la demeure d’un ancien ministre transformée en maison d’hôte. 4 chambres au luxe spartiate, dans un splendide isolement, 50 $ américains la nuit.
Des sarongs, des saris, du batik, des écharpes; des pierres précieuses
ou semi-précieuses, des antiquités (à Kandy). Du thé (choisir le BOPF, Broken Orange Pekoe Flowery), des épices et toute la pharmacopée ayurvédique. Mais attention aux pièges à touristes: ersatz de safran ou de vanille sans parfum.
«Le Poisson-Scorpion», de Nicolas Bouvier (Folio); «Un air de famille» et «Le Fantôme d’Anil», de Michael Ondaatje (Points Seuil).