Sitôt débarqué, Robinson s'inquiète : les pessimistes prétendent en effet que ces joyaux couleur mer du Sud seront balayés d'une simple vaguelette avant la fin du siècle ; les optimistes jurent que le corail, un organisme diablement vivant, prendra le dessus et maintiendra sa muraille au-dessus des flots.
En attendant, Robinson s'installe en son nouveau royaume. Une île pour lui, ou presque.
Voilà l'une des spécificités des Maldives que d'avoir désigné 87 de leurs confettis (la république islamique en compte officiellement 1 190 dont 900 parfaitement déserts) pour abriter chacune un, et un seul, hôtel. Toutes les catégories sont représentées. Du joli bungalow grand ouvert sur le large au palace cinq fois étoilé. Ici, une maison juste assez grande pour abriter une trentaine d'hôtes, là-bas, un vaste domaine qui offre une parfaite intimité à ses deux cents résidents. Sur telle île, un rendez-vous britannique, sur sa voisine, le français ou l'italien comme langue de rencontre.
Mais, partout, les mêmes ingrédients essentiels, uniques : plage (somptueuse), soleil (de plomb), lagon (limpide et tiède) et les plaisirs d'un aquarium grandeur nature. Accessoirement, chacun ajoute à son envie nuits étoilées (grandioses), spa avec massages (dernier cri) et gastronomie (réjouissante). Autant dire que les Maldives alimentent parfaitement les passions. De préférence lorsqu'elles se déclinent sur le mode torride.
Une adresse, le Taj Exotica Resort, installé sur l'île d'Embudu Finolhu , s'ajoute à la liste des maisons qui rivalisent de charme et de luxe sur cet archipel tout de bleu et de soleil. Elle rejoint la bonne vingtaine d'enseignes internationales qui placent les Maldives au panthéon des vacances balnéaires, en concurrence avec l'île Maurice ou les Seychelles voisines.
Outre les plaisirs de son hôtel et de ses bungalows pieds dans l'eau, il n'est évidemment pas question de résister à l'appel de la plongée. Deux solutions. La première consiste à barboter avec masque et tuba, sans quitter sa terrasse du regard. Y compris en jouant les aventuriers à quelques dizaines de brasses pour peu qu'une patate de corail affleure. Les petits poissons adorent ces entrelacs propices aux cachettes.
Excellent pour une première approche de cet aquarium grandeur nature qui fait la félicité maldivienne. Deuxième option, embarquer pour une excursion plus lointaine, en compagnie de moniteurs expérimentés. Tous les hôtels abritent un centre qui dispense cours pour les plongeurs débutants et recommandations au profit des habitués du Grand Bleu.
La sortie conduit à la barrière de corail, afin d'en explorer le tombant. Ceux qui redoutent l'infini de l'océan et ses monstres droit surgis des abîmes, se replient sur un mini-atoll à peine submergé, au coeur du lagon principal. Par trois mètres de fond, des milliers de poissons, des effilés et des rondouillards, les curieux comme les rayés de jaune ou frappés de pois rouges, des bleus fluorescents autant que des poissons clowns flirtant avec leur anémone, les picassos, chirurgiens, coffres...
Il n'est pas rare qu'une raie manta, un requin de lagon (parfaitement inoffensif) ou une tortue ajoutent leur élégant ballet au spectacle. Grandiose. Surtout quand une colonie de dauphins entre dans la danse, multipliant les pirouettes et les vrilles qui transforment le lagon en vaste bassin de jeu. Impossible, alors, de ne pas voir dans ces facéties une forme de communication entre cétacés et genre humain...
Rassasié de fééries aquatiques, vient l'heure de viser par-delà son horizon hôtelier. Les petits immeubles de Malé (80 000 habitants), la mini-capitale des Maldives, jouent les modestes skyline depuis les îlots qui flottent à portée de regard : Embudhu Finolhu, mais également Giraavarii, Wataru, Girifushi, Himmafushi, etc. Trente minutes de bateau plus tard, la capitale offre ses ruelles paisibles et la souriante bousculade de son marché où les étals de thons côtoient les régimes de bananes et les piles de tissus chamarrés.
Islamique la République des Maldives ? En attestent les épouses voilées de noir et l'appel du muezzin qui suspend régulièrement la rumeur de ce gros bourg.
A l'inverse, les jeunes couples en jeans autant que les statistiques qui avouent de singuliers taux de divorces (il est courant que certaines femmes en soient à leur quatrième union) tempèrent toute rigueur. Quant aux joueurs de Scrabble, ils sont ravis d'apprendre que la devise locale, le rufiya, est évidemment divisée en cent laaris. Les simples curieux notent tout de même que la législation locale sanctionne durement les buveurs d'alcool et ceux qui négligent la vertu.
Les Maldives sont probablement le dernier pays au monde dont le code pénal inflige le bannissement. Début novembre à Malé, un jeune acteur a été surpris en compagnie d'un ami alors qu'ils échangeaient un peu plus que des bons mots et une poignée de main. Il ira méditer quelques mois un répertoire plus convenable sur une île lointaine. Pareillement, une épouse adultère a été condamnée à huit mois de résidence forcée sur un atoll perdu où nulle tentation ne se présentera à elle. Paradoxe des Maldives : l'île déserte, paradis de Robinson occidental, peut aussi devenir enfer carcéral.