Jusqu'à trois cents touristes arpentent simultanément les pentes du Kilimandjaro - soit, en comptant porteurs et guides, mille personnes. Des camps de base s'échelonnent le long des trois chemins menant au sommet : la voie normale, jalonnée de refuges, qui monte régulièrement ; la traversée, qui grimpe par un itinéraire plus rare et redescend par la voie normale; et la voie Machame, réputée la plus belle. Parmi les candidats à l'ascension (dont les trois quarts parviendront au sommet), quelques jeunes et beaucoup de quinquagénaires en forme : le coût de l'expédition la réserve aux voyageurs aisés, et sa difficulté aux gens bien entraînés.
Nous avons pris la voie Machame, qui tourne, sinue, redescend. Elle donne le temps de s'habituer à l'altitude et traverse, en cinq jours, une grande variété de paysages. À commencer par une forêt luxuriante, qui monte jusqu'à 3000 mètres d'altitude. Quand les nuages se dégagent, généralement le matin, apparaît dans la plaine la silhouette du mont Meru (4565 m). Bientôt, la forêt cède la place aux séneçons géants. On voit peu d'animaux, mais la silhouette du Kibo, le plus haut des trois pics du « Kili », se profile.
Avec la montée au col de Lava Tower (4600 m) commence la véritable ascension. On redescend dormir à 3900 m. De là démarre le marathon vers le sommet. Départ à 7 heures du matin pour atteindre, vers 15 heures, 4600 mètres d'altitude, face au mur de Barranco. 300 mètres de dénivelé mènent au pied du glacier Kersten. Le tri, cruel, se fait entre ceux qui supportent les hauteurs et les autres. Le mal d'altitude est injuste : il peut frapper les plus aguerri des montagnards et épargner le complet novice. Il ne faut surtout pas s'entêter. Chaque année, il y a des morts, même si les chiffres sont flous.
Le Mawenzi, l'autre sommet, domine le camp de base. Là, dernier repas, derniers préparatifs, dernier repos : on se couche (si on veut) pour se relever à 11 heures du soir. Le froid mord. On se couvre. Et c'est le départ pour le col de Stella Point, puis le sommet, au lever du soleil. Le long de la pente volettent les lueurs des lampes frontales. Le terrain est un pierrier : on descend un pas quand on en fait trois, et le parcours se termine par un raidillon heureusement invisible dans l'obscurité. L'altitude fatigue, le sac pèse. Certains abandonnent et redescendent.
Au lever du soleil, le col se dessine. La récompense est à la hauteur de l'effort - du moins si le sommet n'est pas dans les nuages, ce qui est hélas ! fréquent. Le long de la route qui monte jusqu'à Uhuru Peak, le point culminant, le soleil naissant joue sur les glaciers veinés de bleu. La terre est rouge, presque noire. L'oeil du cratère semble guetter le ciel. Au loin, l'Afrique s'étend. La fatigue s'envole..
infos pratiques
- Partir en saison sèche : janvier-février ou juillet-septembre, période de plus grande fréquentation.
- Accès par le Kenya (Nairobi), avec ensuite 6 heures de minibus, soit par la Tanzanie (Kili Airport), avec 1 h 30 de transfert. Visa à l'aéroport de Kili (50 $) ou à la frontière Kenya-Tanzanie.
- Paris-Nairobi à partir de 554 E sur KLM (0890-710-710)
- Porteurs, guide et cuisinier obligatoires. Si vous en êtes content, le pourboire sera d'environ 10% du prix de l'ascension.
- Prévoir deux sacs à dos : un grand, que vous laisserez aux porteurs, et un petit pour garder avec vous les affaires de la journée.
- Lampe frontale, Micropur et aspirine nécessaires.
- Le mal des hauteurs peut causer maux de tête et vomissements à partir de 4500 mètres. Les problèmes d'oxygénation rendent la montée pénible et fatigante: grande forme avant le départ. Pendant l'ascension, bien manger et beaucoup boire.
- Prévoir des vêtements (et sous-vêtements) contre le froid : la dernière marche se fait souvent par - 20 °C, même en août.
- Vaccin contre la fièvre jaune et traitement antipaludéen conseillés.
Lire
Les Neiges du Kilimandjaro d'Ernest Hemingway ; La Ferme africaine de Karen Blixen ; La Piste fauve de Joseph Kessel (tous les trois aux éditions Gallimard, coll. « Folio »).