Etrange ville, à déchiffrer comme un palimpseste, un parchemin où le texte tracé jadis a été enfoui sous une écriture plus récente. A Hambourg, ce sentiment s'impose peut-être plus qu'ailleurs. Dans une cité si moderne, où les forêts forment de magnifiques coulées vertes, où pas moins de 2 400 ponts se reflètent dans des canaux, tout paraît pourtant calme, propre, en ordre. Les Hambourgeois circulent volontiers à vélo, les étudiants jouent au foot dans les parcs ou prennent le soleil au bord de l'Elbe. Ambiance idyllique dans les bateaux des croisières fluviales, sur les voiliers, sur les plages. Les cloches des églises à toit de cuivre verdi carillonnent joyeusement. Des pavillons, des terrasses lumineuses accueillent buveurs de bière, amateurs de glaces ou... de sushis. Pour simplifier, disons que règnent ici arbres, eau, brique, verre et acier. La municipalité est d'ailleurs à la fois rouge et verte. Mais, derrière cette image policée, raisonnable et sereine, où les générations se mêlent dans la bonne humeur, se cache une métropole cosmopolite, une âpre cité marchande où cohabitent négociants millionnaires, yuppies à portable et chauffeurs de taxi turcs ou portugais.
«C'est la plus belle ville d'Allemagne, c'est presque la nature avec, en prime, d'innombrables possibilités culturelles et des musées exceptionnels!» assure la chaleureuse Helma, 27 ans, vendeuse dans une boutique de disques et amoureuse inconditionnelle de sa cité natale. «Je vis dans une maison des années 50, l'une des premières construites après la guerre. A cause du port, le premier d'Allemagne, c'est une ville multiculturelle: j'ai des copains marocains, jordaniens, brésiliens. Ma meilleure amie est australienne. Le soir, nous fréquentons les cafés qui bordent l'Alster, nous buvons de la bière blanche au bord de l'eau ou nous allons dans les fêtes de rue.»